Encore une lecture d'un livre reçu en service de presse, le deuxième consécutif par l'intermédiaire de la plateforme Simplement.pro, après [b:La Symétrie de l'Effet 37959974 La Symétrie de l'Effet Jules Mudhiac https://images.gr-assets.com/books/1516093407s/37959974.jpg 59686376] dont je parlais en fin de semaine dernière. C'est l'auteur qui m'a contacté sur le site pour me proposer de découvrir son roman. Je n'accepte pas toutes les sollicitations, j'essaye de ne pas m'éparpiller, je préfère plutôt me concentrer sur les oeuvres susceptibles de m'intéresser mais aussi garder du temps pour mes lectures hors service de presse, les livres que j'ai achetés et prévus de lire indépendamment des sites comme Simplement.pro ou NetGalley.Dans le cas de ce roman Un secret halo de rose, le synopsis m'a intrigué et m'a donné envie d'accepter cette lecture :« Je me sens bien, animé d'un sentiment de plénitude. Les yeux plissés en guise de protection solaire, je respire profondément, hyperventilé, et tout un tas de fictions et scenarii me pénètrent, me traversent, se bousculent. L'inspiration revient comme un cheval au galop, à la vitesse de la marée montante. Je médite. Je somnole. Je m'évade, néo adepte de contemplation. Je platonise. La journée a fusé, si j'en crois le ciel qui commence à rosir, formant des halos entre ciel et mer, entre chien et loup. Sans emphase il y a encore peu de temps, je suis désormais en phase de réanimation. Sans envie il y a si peu de temps, je suis désormais en vie. »Ronan est en détresse depuis la mort de son meilleur ami. Un banal accident de la route aux abords d'un rond-point damné. Que s'est-il vraiment passé ce soir-là ? Ronan ne sait plus très bien. Pourtant, il était aussi dans la voiture. Depuis, ses souvenirs s'entrechoquent, brouillent sa mémoire et les pistes, le mènent à l'impasse. Harcelé par le père du défunt, otage de ses propres démons et hallucinations, lâché par son psy, il s'exile alors sur le phare de la Vieille, au large de la pointe du Raz, où il vivra une odyssée aussi salvatrice qu'extraordinaire, aux confins de l'irréalité.Ceux qui me suivent depuis longtemps ici savent que les romans qui parlent du deuil, de l'absence, du manque, m'ont toujours interpelé, [a:Philippe Besson 199634 Philippe Besson https://images.gr-assets.com/authors/1297091272p2/199634.jpg] qui est passé maître à ce jeu n'étant pas par hasard mon auteur favori. J'avais donc envie de plonger dans ce livre, publié par Prem'Edit, une petite maison d'édition dont la particularité est d'avoir un comité de lecture “citoyen” composé de 120 lecteurs ; c'est en quelque sorte une maison d'édition participative, et je dois dire que je trouve cette idée plutôt sympathique et que j'ai envie de l'encourager ici.Le narrateur est agent immobilier le jour, écrivain amateur la nuit. Ronan est hanté par la mort de Tristan, son meilleur ami décédé dans un accident de la route. Ayant lui-même survécu à cet accident, il culpabilise et les circonstances du drame le hantent. Autour de lui gravitent un psychothérapeute pour le moins excentrique et un père au deuil vengeur.Le style d'écriture est assez étonnant. L'humour est omniprésent, cela fonctionne parfois, mais pas toujours. Le texte est émaillé d'une succession de jeux de mots et de mots d'esprit, parfois réussis, mais qui finissent par peser et ont un peu perturbé ma lecture au bout d'un moment. Je comprends le jeu que cela constitue pour l'auteur au moment de l'écriture, ainsi que la volonté de bien faire, mais mon impression en tant que lecteur a parfois été proche de la saturation sur cet aspect. Ce qui est assez drôle, c'est que le narrateur, lui aussi écrivain amateur à ses heures perdues, commence son récit en expliquant qu'il a tendance à vouloir trop en faire quand il écrit, qu'il relit et retravaille sans cesse ses textes jusqu'à ce qu'il soit totalement satisfait de chaque phrase. J'ai pris cela comme une auto-critique déguisée de l'auteur, et j'ai trouvé cela assez malin.Ce qui est également malin, c'est le déroulement du roman lui-même. C'est un récit décousu et par moments difficile à suivre, avec des temps faibles, notamment au milieu du livre où j'ai parfois perdu à la fois le fil et l'attention. Mais c'est aussi un récit qui retrouve du rythme et qui trouve tout son sens dans sa dernière partie. Je me répète, mais j'ai vraiment envie de dire que c'est un livre malin.Je pense qu'il faut être intéressé par les tourments et les secrets de l'esprit humain pour y être sensible, mais c'est plutôt un beau roman. Cela m'a en tout cas suffi pour oublier des effets de style un peu lourds sur la durée, que l'auteur gagnerait à atténuer dans ses prochains écrits s'il ne veut pas prendre le risque de perdre en route quelques lecteurs pourtant de bonne volonté.
C'est un roman Young Adult, mais il y a presque une touche thriller qui m'a bien plu. C'est en tout cas un roman très réussi et passionnant à lire.
Contrairement à [b:Tout le pouvoir aux soviets 37854291 Tout le pouvoir aux soviets Patrick Besson https://images.gr-assets.com/books/1515412035s/37854291.jpg 59554610] que je venais de terminer, écrit par un auteur, [a:Patrick Besson 144655 Patrick Besson https://images.gr-assets.com/authors/1387376644p2/144655.jpg], dont j'avais déjà entendu parler même si je ne l'avais jamais lu, l'auteur (auteure ? actrice ?) de La désertion m'était totalement inconnue. J'ai découvert ce roman dans le catalogue de la plateforme NetGalley.fr par l'intermédiaire de laquelle l'éditeur a accepté de m'envoyer gracieusement un exemplaire numérique de ce livre en “service de presse”.Le résumé de l'éditeur m'avait suffisamment intrigué pour me donner envie de découvrir ce roman :« Le premier jour d'absence il était descendu à l'heure du déjeuner pour l'attendre dans le parc, caché derrière l'arbre d'où il observait la sortie de ses subordonnés. Il avait ensuite vérifié les registres de la badgeuse. Aucune trace d'elle. »Un jour, Eva Silber disparaît volontairement. Pourquoi a-telle abandonné son métier, ses amis, son compagnon, sans aucune explication ? Tandis que, tour à tour, ses proches se souviennent, le fait divers glisse vers un récit inquiétant, un roman-enquête imprévisible à la recherche de la disparue.La disparition soudaine d'Eva est le point de départ et le coeur du récit. Celui-ci est composé de quatre parties successives, dans lesquelles nous découvrons un narrateur différent :- Franck, le directeur pervers, voyeur et harceleur d'Eva- Marie-Claude, la collègue bienveillante et conventionnelle d'Eva- Paul, l'étrange ami-amant avec qui Eva avait une relation avant sa disparition- Eva, elle-même, pour conclureCes gens défilaient dans son bureau armés d'une sorte de servilité qu'il n'avait connue qu'à l'école. Elle obéissait à la règle informulée stipulant qu'on devait, toujours, et avec férocité, taper sur le plus faible pour ne pas paraître faible soi-même.J'ai bien aimé cette construction chorale où chaque personnage nous fait partager sa vision d'Eva, de sa vie, et ses relations aux autres, et de sa disparition. A l'image d'un puzzle que l'on reconstitue pièce par pièce, chacun des points de vue apporte une lumière nouvelle sur Eva, un personnage difficile à cerner, que ce soit avant ou après sa “désertion”, pour reprendre le terme choisi pour le titre du livre. Il faut attendre le récit d'Eva elle-même pour mieux comprendre ce qu'il lui est arrivé et la cause de sa disparition du jour au lendemain.Ne lui restait que sa mémoire et, pire, ses sentiments, soit la part de lui-même la plus éloignée de lui, celle qu'il mettait au pas depuis toujours pour exécuter son plan - réussite sociale, normalité, accomplissement, utilisé. Fin de la honte de soi.A travers le destin singulier d'Eva, le roman dresse un panorama triste mais sans doute réaliste de notre société. Emmanuelle Lambert nous décrit un monde du travail déshumanisé, où le processus est roi, où tout est affaire de statistiques, d'indicateurs, où le rôle des managers se résume à une autorité basée sur la surveillance permanente, la recherche de fautes et de coupables. Dans son roman, les relations sociales - faute de pouvoir être qualifiées de relations humaines - sont figées dans des conventions hypocrites où le savoir-vivre et les apparences prennent le pas sur l'honnêteté ; les amitiés sont superficielles, éphémères, fragiles, elles ne tiennent pas le coup face au poids des blessures qu'on refuse de voir.Je n'ai jamais compris pourquoi les gens me renvoyaient tous que j'étais étrange, mais j'ai fini par m'y faire. Il ne faut pas du tout exclure que j'aie cru, un temps, être malade parce que les gens le croyaient pour moi, cela avait du sens après tout ils n'avaient jamais repéré que les choses que je leur livrais. Lorsque tout le monde vous voit comme malade, vous avez besoin d'un peu de temps pour changer la focale.Au fil du roman, j'ai appris à apprécier la personnalité d'Eva, qu'on découvre progressivement au fil des pages. Elle apparait comme une personne déroutante, décalée, dérangée peut-être, mais c'est peut-être le personnage le plus humain du roman. Ses failles sont compréhensibles et on excuse aisément ses difficultés à y faire face, dans une société cruelle où l'humain doit rester anecdotique. On assiste, impuissant, à sa chute, qu'on voudrait éviter, qu'on voudrait lui épargner, car on s'attache à elle.A quel moment ? Quand a-t-elle commencé à chuter dans le désintérêt, dans le dégoût des autres, de la vie, des choses qu'on fait, qu'on aime ? Elle ne pouvait répondre. Pour cela, il lui aurait fallu immobiliser ce moment le plus ténu, ce, ces moments où, d'un coup, tout dissone, rien ne va, rien ne coule, où l'esprit se désintéresse de lui-même, de sa vie, de son corps. Pour cela, il lui aurait fallu être capable d'arrêter le temps pour le contempler.La désertion est un roman court (160 pages), troublant mais prenant, que j'ai lu avec plaisir et intérêt. Le style est simple mais plaisant. Il y a quelques passages très finement écrits et pleins de sens ; je me suis permis d'en citer quelques uns ici. Au-delà de l'enquête sur la disparition d'Eva, qui sert de fil rouge au récit, c'est aussi un livre qui fait réfléchir, et c'est toujours bon signe en littérature.“Pour un être sensible, la pitié, souvent, est souffrance”Herman Melville, dans “Bartleby le scribe”, cité en exergue du roman
J'enchaine des lectures en service de presse en ce moment, autant par plaisir que par souhait de tenir mes engagements auprès des auteurs ou des éditeurs qui ont accepté de me faire confiance. Cette fois encore, il s'agit d'un livre reçu gracieusement en version numérique par l'intermédiaire de la plateforme NetGalley.fr que j'apprends à redécouvrir avec joie.
C'est au tour de Christophe Bigot et de son roman Autoportrait à la guillotine de mettre la tête sur le billot, si je peux me permettre l'expression. Le résumé m'avait intrigué :
« Longtemps, j'ai cru que j'avais été guillotiné dans une vie antérieure. Cet aveu a toutes les allures d'une énormité, je sais. Tout ce que je puis dire à ma décharge est que ma croyance est révolue – quoiqu'elle fasse encore partie de moi. Il y a quinze ans, souffrant de problèmes de dos, j'ai consulté sur le conseil d'une amie un masseur versé en sophrologie. Tout en me pétrissant les lombaires, il m'a questionné sur mon passé. Avec une certaine réticence, j'ai évoqué cette croyance déjà ancienne. Lui a pris la chose très au sérieux. Aussi sec, il m'a parlé d'une patiente qui ressentait des douleurs aiguës entre les omoplates. Elles s'expliquaient, à l'en croire, par des coups de poignard reçus au xve siècle, alors que la dame était assaillie par des Ottomans en plein marché. J'ai trouvé ça exotique. Poétique, presque. En même temps, je me suis retenu de rire. Quand il est question de moi, hélas, je suis incapable de la même légèreté. »
Comment guérir l'obsession d'une vie ? A la créativité instinctive de l'enfance répondent les armes de l'âge adulte : l'humour et la volonté de comprendre. Entre les deux, l'amour maternel, indéfectible.
J'en veux à la génération de mes parents, de mes grands-parents, dont l'inertie en la matière m'indigne : comment cent cinquante ans peuvent-ils séparer Le Dernier Jour d'un Condamné de la loi Badinter ?
Mon obsession n'a pas seulement accouché d'une vocation d'écrivain. Elle m'a offert, après bien des détours, une conscience politique.
Je contemple, avec les yeux si bienveillants de ma mère, l'enfant de six ans, de dix ans, de treize ans que j'ai été. J'ai envie de le prendre dans mes bras, cet enfant, de lui dire de ne pas avoir peur. Mais je vois bien que c'est lui qui me regarde, de l'autre rive du fleuve, et qui me rassure. Lui qui est tellement plus fort que moi, parce qu'il a porté tout ce poids sur des épaules tellement plus frêles. C'est lui qui me dit de ne pas avoir peur, ni de vivre ni de mourir. Je crains hélas de n'en avoir jamais fini, avec la peur comme avec le chagrin. Mais je lui promets d'essayer.
Troisième lecture consécutive d'un roman édité par Stock et dont j'ai reçu gracieusement un exemplaire numérique grâce la plateforme NetGalley.fr. Malheureusement, toutes les lectures en service de presse ne sont pas nécessairement des réussites. Je dois le dire tout de suite : ce roman m'a déçu.
Je ne sais pas dire ce que j'en attendais exactement, même après avoir lu le résumé de l'éditeur :
« J'ai eu envie d'écrire Toni parce qu'aussi vite qu'un météore, il est venu, puis reparti de notre vie. Il me fallait coucher par écrit ces quelques souvenirs qui me restaient de lui afin de les graver, qu'ils ne s'envolent pas comme lui s'est envolé, à jamais. » De Hambourg à Berlin, Toni nous plonge dans l'insouciance de la jeunesse et des nuits magnétiques rythmées par les fêtes clandestines.
Arrête de t'occuper de moi ! Je ne te concerne pas ! Occupe-toi de toi, de ce que tu veux, fais ton chemin. J'ai l'impression, tu vois, et je n'en peux plus d'ailleurs, ça me tue, j'ai l'impression que tu me rentres dans le crâne, le cerveau, m'envahis, que tu y mets tes pieds et essaies de t'y faire une place ! Eh bien, c'est plein, ma tête, mon cerveau, c'est la merde là-dedans, c'est bondé, blindé, il n'y a aucune place pour toi, d'accord ? [...]
Arrête de croire que tu connais mieux que moi mes pensées, mes humeurs, mes envies... C'est mon cerveau, et j'y suis coincé, d'ailleurs, et c'est la merde, et tu n'y entreras pas, et je n'en sortirai pas, j'y suis coincé, coincé, et rien.
Je poursuis mes lectures en service de presse avec La quatrième dimension, roman de l'écrivaine chilienne Nona Fernández, publié en langue espagnole en 2016 et traduit en français par Anne Plantagenet pour une publication cette année par Stock.
Le résumé m'avait attiré :
« Son visage en couverture d'un de ces magazines, et la photo barrée d'un titre en lettres blanches : j'ai torturé. »
Le 27 août 1984, Andrés Antonio Valenzuela Morales, agent du renseignement des Forces Armées Chiliennes livre à une journaliste des aveux glaçants sur l'enlèvement, la torture et l'assassinat de milliers de personnes disparues. Son témoignage marque profondément Nona Fernández, alors âgée de treize ans. Des années plus tard, au moment où le Chili prône la réconciliation nationale et le droit à l'oubli, elle décide d'écrire son histoire.
Pourquoi écrire sur vous ? Pourquoi ressusciter une histoire vieille de plus de quarante ans ? Pourquoi parler encore de couteaux, de grils électriques et de rats ? De disparitions forcées de personnes ? D'un homme qui a participé à tout ça et qui, à un moment, a décidé qu'il n'en pouvait plus ? Comment décide-t-on qu'on n'en peut plus ? Quelle est la limite pour prendre cette décision ? Existe-t-il une limite ? Avons-nous tous la même ? Comment aurais-je réagi, moi, si à dix-huit ans, comme vous, j'avais fait mon service militaire obligatoire et si mon supérieur m'avait ordonné de surveiller un groupe de prisonniers politiques ? Aurais-je obéi ? Me serais-je enfuie ? Aurais-je compris que ce serait le début de la fin ? Qu'aurait fait mon conjoint ? Et mon père ? Que ferait mon fils dans cette situation ?
Je ne veux pas que mes enfants sachent ce que j'ai été, dit-il. Je vais retourner à mon travail et payer pour ce que j'ai fait. Je me fiche s'ils me tuent.
J'ai l'impression d'alterner le bon et le moins bon en ce moment avec mes lectures en service de presse. Cette fois encore, je viens de terminer un livre dont j'ai reçu un exemplaire numérique par l'intermédiaire de la plateforme NetGalley.fr.
Je ne savais pas exactement quoi attendre de ce roman, dont le résumé m'avait laissé entrevoir quelques promesses :
“Je suis le dromadaire qui passe, d'une lucidité active, ironique et curieux, l'humour est ma carapace, l'étonnement ma joie, je traverse la vie en éternel locataire, grain de sable sans illusions.”
Intenses ou légers, sombres ou joyeux, les instants précieux sont le sel d'une vie.
Christian Blanckaert prend un verre d'eau fraîche avec sa fille sur une terrasse ombragée. Il passe une journée seul dans un jardin japonais. Il se souvient de ses conversations avec François Mitterrand quand il avait dix-huit ans. Sa jeunesse était solitaire. Son meilleur ami meurt à l'hôpital. Bernard Cazeneuve l'a emmené en Chine. Jean-Louis Dumas l'a épaté. Un temple au Cambodge est une porte ouverte sur son imaginaire. Raymond Barre aimait partager des plats canailles en parlant politique avec lui. Pierre Bergé l'a étonné. Il n'a presque jamais vu son père. En classe de troisième, un professeur de français a changé sa vision de l'existence. Il est maire de son village, c'est une dette d'enfance.
Grand dîner au palais du Peuple, je suis placé en face de Bernard Cazeneuve, mais à cinquante mètres de lui car la table est immense, nous sommes soixante autour de deux Premiers Ministres.
Le dîner commence, musique, fanfare, soudain, je reçois un SMS : “passe-moi le pain”. Il est comme cela, Cazeneuve, toujours prêt à rire, toujours ce mélange entre le sérieux, l'élégance et la dérision.
Mendès France, je ne le connais pas. Je l'avais aperçu au mariage de Nathalie de Fleurieu et de Jérôme Duhamel, mon vieux pote.
Finalement, c'est involontairement un portrait fascinant et accablant de cette fameuse “France d'en haut », de ceux qui réussissent et dont la réussite entraîne la réussite, de ceux dont le « réseau » ouvre toutes les portes, y compris semble-t-il celles de l'édition ...
Un livre atypique de Christophe Donner, et ce n'est clairement pas mon préféré de cet auteur. Dans ce livre, qu'on pourrait qualifier d'essai ou de pamphlet, Christophe Donner explique sa vision de la littérature, qu'il estime devoir être basée sur le faits et la vie de l'auteur et non sur l'imagination. C'est aussi l'occasion pour l'auteur de régler ses comptes avec certaines personnalités du monde littéraire et artistique. Au final, ce livre laisse une drôle d'impression : si la vision de Christophe Donner sur l'art et la littérature se défend et vaut autant qu'une autre, sa façon de la défendre dans cet essai m'a embêté et parfois même agacé.
J'ai voulu lire ce roman sans tenir compte de la réputation sulfureuse de son auteur, parce que c'est un classique de la littérature française. Je me suis ennuyé quasiment du début à la fin. Le style était sans doute novateur voire révolutionnaire pour l'époque, mais je l'ai trouvé horriblement agaçant, tout comme les personnages, pitoyables et absolument pas attachants. Comme je l'ai lu ailleurs, j'ai eu envie plusieurs fois d'hurler au “héros” de fermer sa g***** tellement il m'agaçait. Quelle déception.
“La septième vague” est la suite, un peu laborieuse et bien moins intéressante, de “Quand vient le vent du nord”. L'auteur surfe sur le succès du premier roman pour nous proposer une suite qui se lit facilement mais surprend moins que le précédent. C'est sans surprise, plutôt prévisible, parfois carrément ennuyant, et globalement sans vraiment de saveur. Un bon divertissement, sans plus.
Lucas, seize ans, découvre le journal intime de son frère cadet Marcus, décédé d'une mystérieuse maladie six mois plus tôt alors qu'il n'avait que quatorze ans. Lucas lit ce journal puis le complète avec son propre récit et entame ainsi un étrange dialogue avec son frère disparu. C'est un roman à la fois drôle et émouvant : la gravité du sujet et la naïvité des personnages donne un mélange agréable à lire.
Un très beau roman sur l'adolescence et le passage à l'âge adulte, sur l'amour et la mort, le tout sur fond de musique classique, dans un cadre méconnu : la Norvège des années 60. Un plaisir à lire.
J'aime l'Histoire. C'est le cas depuis le collège et le lycée, et c'est plus fort que moi. Je lis assez régulièrement des ouvrages historiques, et parfois des romans historiques. Il y a plus d'un an, j'avais repéré ce livre sur Louis XVII sur NetGalley.fr, j'ai sollicité un exemplaire numérique que l'éditeur avait accepté de m'envoyer, mais je l'avais mis de côté, pour je ne sais quelle raison.
Louis XVII est un livre de l'historienne Hélène Becquet, dont l'ambition est parfaitement décrite dans le résumé :
La vie, la personnalité et les enjeux entourant l'enfant roi esseulé, emprisonné, sans trône et sans pouvoir, dernier espoir de la monarchie.
Empoisonné, évadé, ressuscité ? Les hypothèses et les mystères entourant la vie et la mort de Louis XVII ne manquent pas, mais sont pourtant bien éloignés de la vérité.
Louis XVII est sans doute l'inconnu le plus illustre de notre histoire tant le mythe a éclipsé la brièveté de sa vie également marquée par le paradoxe et la tragédie. Paradoxe d'un prince devenu Dauphin en 1789, au moment où la monarchie absolue s'effondrait. Tragédie d'un roi sans royaume, d'un orphelin à la fois captif et otage des luttes de pouvoir inhérentes à la Convention.
Instrumentalisé, esseulé et malade, il succombe à dix ans à la prison du Temple en juin 1795, ouvrant la voie à des décennies de controverses sur les circonstances de sa mort et son hypothétique survivance.
En biographe exemplaire, Hélène Becquet exhume la vérité derrière les légendes, racontant son existence oubliée avant d'ausculter sa surprenante postérité au terme d'une enquête de plusieurs années.
Dix petites années séparent la naissance fastueuse du duc de Normandie de la mort tragique de Louis XVII au Temple. En d'autres temps, cette courte vie aurait été un drame personnel pour la famille royale, aurait pu susciter des inquiétudes momentanées, mais n'aurait guère eu de retentissement. [...] L'exception constituée par le second fils de Louis XVI vient de la prodigieuse accélération donnée à sa carrière princière, si l'on ose dire, par la Révolution. Face à un roi qui suscite des doutes dans le public, le Dauphin devient un personnage central malgré son jeune âge – ou plutôt en raison même de son jeune âge. C'est en lui que les monarchistes constitutionnels, qui veulent allier Révolution et royauté, placent toutes leurs espérances. La chute de la monarchie et le régicide en font ensuite le seul roi légitime pour toutes les sensibilités royalistes, mais un roi enfermé, dont le sort ne cesse d'inquiéter, et qui, surtout, ne peut donner aucune impulsion politique. Louis XVII est doublement impuissant par son âge et par son emprisonnement, mais le sang royal dont il est issu, les malheurs qu'il a subis lui confèrent en regard une double légitimité : celle de la naissance et celle du malheur. Sa mort laisse les royalistes orphelins.
Je pense que cela me fait du bien de varier un peu mes lectures après plusieurs semaines où j'ai principalement lu les livres en service de presse. C'était chaque fois des livres que j'avais malgré tout choisis de lire, mais l'engagement pris tacitement auprès de l'éditeur de lire et chroniquer chaque ouvrage sollicité induit une sorte de contrainte qui peut peser. A l'avenir, je serai vigilant à alterner plus régulièrement les lectures totalement choisies et celles sollicitées et reçues en service de presse.
Cette fois, pas de service de presse, il s'agit d'un livre assez court intitulé Manuel d'écriture et de survie par Martin Page, un écrivain français dont je n'avais lu aucun des romans jusque là. Je vous laisse découvrir le résumé avant de vous en dire plus :
Martin Page répond aux lettres d'une jeune écrivaine prénommée Daria. Tout en lui donnant des conseils d'écriture, il esquisse des moyens de se débrouiller avec le monde, avec le milieu littéraire, avec ses propres névroses et fragilités. Au fil de ce dialogue, il brosse aussi une sorte d'autoportrait. Entre dépression et exaltation, il nous parle de l'art sauvage de l'écriture, un art encore jeune, riche de possibilités. Sans escamoter la dureté sociale ni la réalité des coups et des blessures, il défend l'imagination comme forme de résistance et de création intime. La littérature est un sport de combat autant qu'un des grands plaisirs de l'existence.
Un écrivain devrait être fidèle à toutes ses œuvres, car elles sont le reflet de son évolution. Il ne s'agit pas de tout aimer sans nuances, mais de respecter l'être qu'on était et qui a fait de son mieux.
Le livre est un objet magique. Non seulement la littérature est une source de plaisirs et de connaissances, mais elle sauve des vies. Le dire paraît exagéré en ces temps de tiédeur. Je le répète : la littérature sauve des vies. Il y a quelques semaines j'ai reçu la lettre d'une femme qui me racontait qu'à une époque de sa vie les livres lui avaient permis de gagner un combat contre le désespoir, et de renaître. J'ai reçu quantité de lettres semblables. Les livres sont des armes et des outils pour transformer nos vies.
Toute ma jeunesse a été solitaire. Je n'arrivais pas à être avec les autres. C'était comme si j'étais à des milliers de kilomètres. J'ai mis du temps à rencontrer ceux qui seraient mes amis. Quant à ma vie sentimentale, elle a été vide pendant des années. Je connais bien ces jours et ces soirées sans fin où rien ne se passe, ces samedis soir où les bruits des joyeuses soirées alentour blessent le cœur de celui qui est seul chez lui. Peu à peu, j'en ai fait un espace de liberté et de création. Seul, je ne suis jamais seul. C'est parmi les autres que je suis seul. Cette découverte est un soulagement.
Tu me demandes pourquoi j'écris. La vraie question me semble plutôt être : mais pourquoi tout le monde n'écrit pas ? C'est une chose si magique que ne pas le faire est pour moi incompréhensible. Tout le monde devrait écrire. En tout cas, avoir cette possibilité et s'y sentir autorisé.
Mais je ne me défile pas, je vais te répondre. J'écris parce que c'est un plaisir infini, parce que j'aime voir mes idées se transformer en un livre, parce que c'est ainsi que j'affronte la mort, parce que ça me permet des rencontres, parce que c'est une façon de continuer à m'inventer, parce que je peux jeter mes angoisses et mes obsessions sur le papier comme dans une arène, parce qu'ainsi ma conscience et mon inconscient entrent en conversation, parce que c'est une manière de m'en sortir. J'écris pour contre-attaquer et manger ce monde qui essaye de me dévorer. J'écris pour équilibrer le rapport de force avec le réel. J'écris pour avoir une bonne excuse d'être à l'écart et de me soustraire aux jeux sociaux. J'écris parce que l'encre sur le papier m'émeut. J'écris par plaisir, pour en recevoir et pour en donner. J'écris parce que j'aime la fiction et que je crois en son pouvoir. J'écris aussi pour des raisons moins nobles : parce que ça me donne l'occasion de prendre une revanche, et parce que, désespérément, je veux qu'on m'aime. C'est absurde, je le sais. Rien d'extérieur à moi-même ne résoudra mes problèmes narcissiques. Mais c'est ainsi.
Mais que font les plus fragiles ? Ils chutent et s'abîment sans cesse. Ceux qui pensent que nous vivons dans une société juste et démocratique mériteraient qu'on les paye au salaire minimum pour un boulot éreintant et ennuyeux.
Si le mercantilisme est une blessure faite à la littérature, l'entre-soi des plus éduqués l'est tout autant. Je vais souvent dans des écoles pour rencontrer élèves et professeurs, et je suis triste de constater que beaucoup d'adolescents (et d'adultes) ont peur des livres. Comment en est-on arrivé là ? Le livre est devenu l'instrument d'une sanction, c'est un devoir et une punition. Ça devrait être tout le contraire. Ce malaise s'incarne dans une polarisation de plus en plus grande : il y a des livres pour le peuple et d'autres pour les plus éduqués. Comme si chaque groupe social devait avoir sa littérature. (Ce phénomène touche tous les arts.) [...]
La majeure partie de la population ne lit pas, elle est donc privée d'un des grands plaisirs de l'existence. Toutes les barrières qui font des livres un art réservé et effrayant sont à faire tomber. Allons dans les écoles, les prisons, les universités, parlons des livres sur internet. La littérature est pour tout le monde.
La France est un curieux mélange : c'est une société éclairée, riche de talents et de désirs, mais archaïque, sclérosée et violente. Elle est fragilisée par une école faussement républicaine (et réellement créatrice de réseaux et d'endogamie), le respect de l'autorité, et une organisation sociale hiérarchique qui décourage et opprime les personnalités atypiques, compétentes et originales. La créativité et l'enthousiasme y sont mal considérés, la cruauté des petits chefs incapables récompensée. Je me demande où ça va nous mener.
Si on veut défendre le livre, il faut défendre une certain conception de la vie en société. Les lecteurs doivent avoir les moyens d'acheter des livres et avoir du temps à consacrer à la lecture. Je ne vois pas comment on peut déclarer aimer le livre et soutenir une politique qui pousse la plupart des femmes et des hommes à travailler constamment pour s'en sortir. Le livre existe grâce à un environnement. C'est un fait de civilisation.
Alors que la Coupe du Monde de football 2018 vient de commencer en Russie, j'ai lu ce livre repéré sur NetGalley.fr et reçu en service de presse. Le thème m'a tout de suite intéressé :
Trop grande, trop froide, trop isolée, la Russie n'était pas faite pour le football. Et pourtant, dès qu'il a rebondi sur la terre russe, le ballon rond a fait mieux que s'acclimater. Il est devenu l'objet d'une fièvre populaire que le Kremlin, de Staline à Poutine, cherche à instrumentaliser.
Beria était le patron du KGB, mais aussi le parrain des équipes du Dynamo de Moscou et Tbilissi, faisant de ces clubs les instruments d'une lutte sans merci contre » l'équipe du peuple « , celle du Spartak Moscou. Pendant des décennies, deux clans se sont affrontés et tous les coups étaient permis, jusqu'à la déportation au Goulag des meilleurs joueurs de l'équipe adverse.
En Russie, le football est un sport de combat politique : dès les premières rencontres à Saint-Pétersbourg qui avaient de furieux airs de lutte des classes ; lors du » match de la mort » du 9 août 1942, opposant Ukrainiens du FC Start et nazis de la Luftwaffe ; dans la façon dont le régime mit en scène ses vedettes comme Lev Yachine ; avec le football » scientifique » qui conquit le monde pendant la guerre froide ; dans le rapport qu'entretiennent les oligarques avec ce sport, et jusqu'à l'organisation éminemment politique du Mondial 2018.
Fourmillant d'anecdotes mettant en scène grands leaders et champions soviétiques, ce livre raconte davantage qu'un siècle de football : il décrypte le pouvoir russe à travers le prisme du ballon rond.
Ce livre raconte une histoire de l'URSS et de la Russie à travers le football. Une histoire terrible et grandiose vue depuis les tribunes, où le peuple en supportant tel club plutôt qu'un autre trouvait le moyen de s'exprimer. Comme l'a dit le génial compositeur Dimitri Chostakovitch, fan absolu de foot : « Le stade de football, c'est le seul endroit en Union Soviétique où on pouvait être non seulement pour, mais aussi CONTRE ! »
« J'adorais le foot bien sûr. Mais à vrai dire, c'est surtout le Dynamo que j'adorais. Et la Géorgie à travers lui. Le soutenir, pour nous, c'était secrètement se rebeller contre les bolcheviques. C'était d'abord être Géorgien. Et comme on ne pouvait pas l'exprimer ouvertement, cela aurait été le Goulag assuré, on le disait en soutenant notre Dynamo, l'air de rien. Soutenir notre équipe adorée, ça, on avait le droit de le faire.
Depuis son arrivée au pouvoir en août 1999, Poutine s'est politiquement construit sur une seule idée : restaurer la grandeur de la Russie, la remettre au centre de la scène internationale, pour mieux épater son propre peuple notamment. « Je suis un esclave, mais mon Tsar gouverne le monde », ironisait le poète Mikhaïl Lermontov au XIX° siècle.
Mais, comme pour Staline à ses débuts, Poutine a conscience que son pays est une « puissance pauvre » et pour compenser les faiblesses structurelles du pays, les « Tsars » russes et soviétiques ont recours aux symboles, à l'image et aux rodomontades. Voilà pourquoi le sport est si important pour eux. Les fondamentaux restent, alors l'histoire se répète.
Cette histoire est celle d'un sport que les hommes qui régnaient et qui règnent aujourd'hui au Kremlin ont rarement aimé mais dont ils ont compris qu'on pouvait l'exploiter pour magnifier l'image du pays. Un pays fasciné par l'Occident, par sa puissance, et qui n'a rêvé et ne rêve encore que de se mesurer à lui. Un pays sans doute trop grand et trop froid pour bien jouer au football mais qui aura tout fait pour sauver les apparences grâce au ballon rond.
Chicago Requiem est un roman qui m'a été proposé en service de presse par son auteur(e ?) [a:Carine Foulon 16747989 Carine Foulon https://s.gr-assets.com/assets/nophoto/user/u_50x66-632230dc9882b4352d753eedf9396530.png] sur le site Simplement.pro sur lequel j'avais eu l'occasion de découvrir d'autres romans avec plus ou moins de succès, comme [b:La Symétrie de l'Effet 37959974 La Symétrie de l'Effet Jules Mudhiac https://images.gr-assets.com/books/1516093407s/37959974.jpg 59686376], [b:Un secret halo de rose 40018296 Un secret halo de rose Léonnic Asurgi https://images.gr-assets.com/books/1525193321s/40018296.jpg 61974791], ou plus récemment [b:MOJENN: Légendes & Nouvelles 38641964 MOJENN Légendes & Nouvelles Olivier Le Gal https://images.gr-assets.com/books/1519117255s/38641964.jpg 60253860].Le résumé m'avait intrigué, sans pour autant m'emballer totalement, mais j'avais envie de laisser une chance à ce roman :Chicago, années folles...Sur la scène d'une ville en proie à la corruption, acteurs et gangsters se côtoient.William, issu d'une famille riche et influente, les Henderson, possède un théâtre cerné de speakeasies et de maisons closes. Il aide son épouse, Susan, à reprendre sa carrière d'actrice malgré la corruption et la prohibition.La sœur de William, Meredith, vient de passer cinq ans en prison. Résolue à se venger de son frère et de tous ceux qu'elle pense responsables de son incarcération, elle s'établit à Miami où elle rencontre un certain Al Capone.Le vaudeville peut alors virer au drame, à la scène comme à la ville.J'ai eu assez peur au début, car les premiers chapitres sont lents. Cela présente l'avantage de plonger progressivement dans l'ambiance et dans le récit, mais j'ai bien failli décrocher. L'ambiance me paraissait assez terne, et les personnages ne me semblaient pas attachants. Après avoir lu à peu près 20% du livre, je me suis posé la question d'abandonner, craignant que cela ne décolle jamais. J'ai décidé de continuer malgré tout.La suite est meilleure, avec une intrigue qui se développe et nous entraine dans une saga familiale ayant pour cadre Chicago dans les années 1920. Le cadre est surtout représenté par les histoires autour de la mafia. C'est d'ailleurs l'un des reproches que je ferais à ce roman : je m'attendais à plonger totalement dans l'ambiance des années folles aux Etats-Unis, mais finalement j'ai eu l'impression que cela n'était présent qu'en toile de fond. Je me suis fait plusieurs fois la réflexion que tout ceci aurait pu se dérouler n'importe où et n'importe quand.Malgré tout, le récit est intéressant et plaisant à suivre. Il y a quelques rebondissements plus ou moins surprenants et l'ensemble se laisse lire avec un certain plaisir. Je me dis que cela pourrait être un bon scénario de saga de l'été comme celles avec lesquelles j'ai grandi : une grande histoire familiale avec ses secrets, ses manigances, ses vengeances, et ses couples emblématiques. Ce ne sera pas mon livre de l'année, ni même sans doute celui du mois, mais cela reste une lecture divertissante dans son genre.
Je ne sais pas par quel mystère j'avais perdu ce livre parmi mes services de presse en attente. Je l'avais sollicité sur NetGalley.fr il y a un an, je ne me souvenais pas avoir reçu la réponse positive de l'éditeur, et pourtant j'ai trouvé ce livre parmi mon catalogue disponible il y a peu de temps, alors qu'il ne me semblait pas l'y avoir vu quand j'étais fait le point sur mes services de presse il y a plusieurs semaines.
Qu'importe ce mystère finalement, l'important était que je voulais lire ce livre et que j'en ai enfin eu l'occasion. Le résumé de l'éditeur m'avait donné envie de m'y plonger :
Juste avant que n'éclate la Seconde Guerre mondiale, dans un petit village suisse, deux jeunes garçons vont se lier d'amitié. Gustav, à l'enfance difficile, est orphelin de père. Celui-ci, un policier local a permis, malgré les ordres des autorités, à des réfugiés juifs d'entrer dans le pays. Selon Emilie, sa veuve, la crise cardiaque qui l'a emporté après la guerre, n'est pas étrangère à ce comportement. Elle reporte son amertume sur Gustav. Anton, lui, est un pianiste prodige, choyé par des parents juifs très aisés, qui ont pour lui une très grande ambition et veulent qu'il réussisse une carrière de concertiste. Gustav est invité par Anton et ses parents à les accompagner à Davos, ou ils vont nouer une amitié encore plus forte, au cours de longues promenades dans les bois qui vont sceller leurs solitudes. Si Anton expérimente de terribles tourments psychologiques à l'idée de se produire en public dans des concours musicaux, Gustav de son côté vit une existence de profond désarroi avec une mère qui a perdu son emploi et dont les expériences amoureuses sont sans lendemain.
Les années ont passé, Gustav a ouvert un hôtel à Matzlingen, son village natal. Un jour Anton, devenu professeur de piano, viendra le rejoindre et ensemble ils partageront une existence enfin apaisée.
Quelque part au fond de lui-même, il avait toujours cru que sa mère ne pouvait pas mourir avant d'avoir appris à l'aimer. En vieillissant, il avait essayé de l'y entrainer avant qu'il ne soit trop tard, mais il n'avait pas réussi.
Lorsque j'avais terminé en début de semaine Highly Illogical Behavior j'avais déjà envie de découvrir les autres romans de l'écrivain américain John Corey Whaley. Il ne m'a fallu que quelques jours et la lecture d'un roman très différent de Christophe Donner pour accomplir mon souhait. Il s'agit cette fois du premier roman de John Corey Whaley, intitulé Where Things Comme Back au résumé assez intriguant :
In the remarkable, bizarre, and heart-wrenching summer before Cullen Witter's senior year of high school, he is forced to examine everything he thinks he understands about his small and painfully dull Arkansas town. His cousin overdoses; his town becomes absurdly obsessed with the alleged reappearance of an extinct woodpecker; and most troubling of all, his sensitive, gifted fifteen-year-old brother, Gabriel, suddenly and inexplicably disappears.
Meanwhile, the crisis of faith spawned by a young missionary's disillusion in Africa prompts a frantic search for meaning that has far-reaching consequences. As distant as the two stories initially seem, they are woven together through masterful plotting and merge in a surprising and harrowing climax.
This extraordinary tale from a rare literary voice finds wonder in the ordinary and illuminates the hope of second chances.
It was easier for me to hate everyone in town than hate myself for being afraid I'd be just like them.
My cynicism had been known, from time to time, to get me into accidental trouble. I was especially cynical in groups, perhaps feeling that a witty cut-down about a stranger would earn me the respect and admiration of friends. This rarely worked. You can only act like a jerk so many times before people stop listening to you. Gabriel broke me of this habit one night after I made fun of a couple leaving a movie theater. “You act like you hate everyone. It must be exhausting.” And, having no response, I decided that he was right.
Dr. Webb says that losing a sibling is oftentimes much harder for a person than losing any other member of the family. “A sibling represents a person's past, present, and future,” he says. “Spouses have each other, and even when one eventually dies, they have memories of a time when they existed before that other person and can more readily imagine a life without them. Likewise, parents may have other children to be concerned with—a future to protect for them. To lose a sibling is to lose the one person with whom one shares a lifelong bond that is meant to continue on into the future.”
Il ne m'aura donc fallu qu'une grosse semaine pour lire les trois romans publiés par [a:John Corey Whaley 4113638 John Corey Whaley https://images.gr-assets.com/authors/1303709143p2/4113638.jpg] jusqu'à aujourd'hui. Après l'excellent [b:Highly Illogical Behavior 26109391 Highly Illogical Behavior John Corey Whaley https://images.gr-assets.com/books/1447262135s/26109391.jpg 46054780] et l'étrange mais réussi [b:Where Things Come Back 8563789 Where Things Come Back John Corey Whaley https://images.gr-assets.com/books/1330581469s/8563789.jpg 13432259], j'ai lu cette fois Noggin, un roman au synopsis un peu déroutant au premier abord :Listen — Travis Coates was alive once and then he wasn't.Now he's alive again.Simple as that.The in between part is still a little fuzzy, but Travis can tell you that, at some point or another, his head got chopped off and shoved into a freezer in Denver, Colorado. Five years later, it was reattached to some other guy's body, and well, here he is. Despite all logic, he's still sixteen, but everything and everyone around him has changed. That includes his bedroom, his parents, his best friend, and his girlfriend. Or maybe she's not his girlfriend anymore? That's a bit fuzzy too.Looks like if the new Travis and the old Travis are ever going to find a way to exist together, there are going to be a few more scars.Oh well, you only live twice.On parle donc ici d'un adolescent de seize ans, Travis, qui était condamné par un cancer il y a cinq ans et qui a choisi la cryonisation de son cerveau pour essayer d'échapper à la mort. Cinq ans plus tard, la procédure a miraculeusement réussi et Travis se réveille, sa tête attachée au corps d'un autre adolescent mort récemment. L'idée de départ de ce roman est très étrange, et j'avais clairement peur que le livre se transforme en long délire morbide.En fait, c'est tout le contraire. L'idée de départ n'est qu'un prétexte pour raconter une belle histoire. Travis est parti puis revenu, mais la vie de ses proches a évolué en cinq ans : ses amis ont grandi et ont quitté le lycée, sa petite amie Cate est désormais fiancée, son meilleur ami Kyle qui venait de lui faire son coming-out juste avant sa « mort » est en couple avec une fille, et ses parents semblent l'avoir attendu patiemment pendant cinq ans, même s'ils ont complètement vidé sa chambre. Travis doit retrouver sa place dans tout cela, et ce n'est clairement pas aussi facile qu'il l'aurait pensé.I was a quiet kid who would blush easily when he got too much attention and always walked with his head down and his hands in his pockets. Usually I was sitting in class thinking about something funny to say and never being brave enough to speak up and say it. In my mind I pretended I was too mature and intelligent to clown around with my classmates, but even I knew that wasn't totally the case. I just wasn't quite sure how to be one of them.Il est assez difficile de parler de ce roman sans en dire trop. Il s'y passe finalement peu de choses mais c'est joliment écrit et plaisant du début à la fin. C'est d'abord une jolie ode à la vie mais c'est aussi un beau récit sur la mort, le deuil des amis et de la famille. Il y a quelques beaux passages dans le texte, et des scènes très touchantes dont je ne dévoilerai rien ici pour laisser le plaisir de la découverte aux futurs lecteurs.It made me realize that no matter how often you see or talk to someone, no matter how much you know them or don't know them, you always fill up some space in their lives that can't ever be replaced the right way again once you leave it.Noggin est un roman que je vous recommande chaudement, c'est une jolie lecture, un peu naïve par moments, avec beaucoup de beaux sentiments qui peuvent déplaire parfois, mais le récit est plaisant et les personnages sont attachants. J'étais peut-être dans le bon état d'esprit pour plonger dans ce livre, mais j'en ressors ravi.They kept on like that for a while, and we laughed and told jokes and made fun of one another. But that's why they were there, I guess. Even though I was almost gone, they were still there to remind me that I wasn't quite dead yet. And to be honest, I wouldn't have minded just closing my eyes right then and letting go. Wouldn't that be perfect? Just dying right there with your two best friends helping you remember everything you loved about being alive?And that's how, five days before having my head sawed off my body and carefully placed in a cryogenic freezer in the basement of the Saranson Center for Life Preservation, I got to have the best day of my life. Isn't that something? Isn't that the greatest thing you've ever heard? I bet most people don't even get one person who cares about them that much. And me, I got four of them.Yeah, maybe I got a bad deal the first time around. Sure, it wasn't fair to be dead at sixteen. But you know what? At least I got to live every single second before they finally turned off the lights.
J'avais beaucoup aimé le livre [b:Manuel d'écriture et de survie 22068459 Manuel d'écriture et de survie Martin Page https://images.gr-assets.com/books/1399834608s/22068459.jpg 41401346] de [a:Martin Page 31766 Martin Page https://images.gr-assets.com/authors/1369589747p2/31766.jpg] lorsque je l'avais vu il y a peu de temps, cela m'avait donné envie de découvrir les autres oeuvres de cet auteur qui me semblait intéressant à suivre. J'ai poursuivi ma découverte de sa bibliographie avec son premier succès, un roman intitulé Comment je suis devenu stupide dont le résumé est assez étonnant :Comment survivre dans le monde cruel du capitalisme triomphant quand on est, comme Antoine, un jeune homme lucide et moral ?Martin Page traite une qualité reconnue, l'intelligence, comme un défaut. Selon L'Ecclésiaste, « qui accroît sa science, accroît sa douleur ». Son héros, Antoine, jeune étudiant surdoué, est persuadé que son esprit insatiable est à l'origine de son mal de vivre ; s'il est intelligent, il n'arrive pas à vivre avec intelligence. Après quelques tentatives thérapeutiques radicales, il entreprend de se guérir de cette maladie d'intelligence. Avec application, il cherchera la méthode pour s'offrir une vie enfin un peu douce. Un premier roman drôlement intelligent.Le résumé donne le ton du roman, avec un parti pris qui mêle humour et réflexion de fond sur notre société et la place qu'y occupe l'intelligence. Cela commence très fort, avec l'introduction du personnage d'Antoine. C'est très vite drôle et en même temps intelligent dans les thèmes abordés et dans la façon de le faire.Sur la durée, c'est peut-être un peu plus difficile. J'ai adoré les deux premiers tiers du roman, mais j'ai un peu lâché sur la fin. Je ne sais pas si c'est le récit lui-même qui s'essouffle ou si c'est le ton qui m'a un peu lassé à force.Je garde tout de même un bon souvenir de cette lecture, qui est un premier roman réussi et qui mérite le succès qu'il a eu à sa sortie. Je retiens également quelques passages très bien sentis :Il n'avait que trop souvent constaté que l'intelligence est le mot qui désigne des sottises bien construites et joliment prononcées, qu'elle est si dévoyée que l'on a souvent plus avantage à être bête qu'intellectuel assermenté. L'intelligence rend malheureux, solitaire, pauvre, quand le déguisement de l'intelligence offre une immortalité de papier journal et l'admiration de ceux qui croient en ce qu'ils lisent.Mais aussi :Il avait peu d'amis, car il souffrait de cette sorte d'asocialité qui vient de trop de tolérance et de compréhension. Ses goûts sans exclusive, disparates, le bannissaient des groupes qui se forment sur des dégoûts. S'il se méfiait de l'anatomie haineuse des foules, c'est surtout sa curiosité et sa passion ignorant les frontières et les clans qui en faisaient un apatride dans son propre pays. Dans un monde où l'opinion publique est enfermée dans la réponse à des sondages entre oui, non et sans opinion, Antoine ne voulait cocher aucune case. Être pour ou contre était pour lui une insupportable limitation de questions complexes. En plus de cela, il possédait une douce timidité à laquelle il tenait comme à un vestige enfantin. Il lui semblait qu'un être humain était si vaste et si riche qu'il n'y avait pas plus grande vanité en ce monde que d'être trop sûr de soi face aux autres, face à l'inconnu et aux incertitudes que représentait chacun.Et enfin :S'il avait reçu de nombreuses et profondes blessures, ça n'avait en rien durci son caractère ; il gardait intacte son extrême sensibilité, qui, comme une phénixienne chair de soie, renaissait plus pure que jamais à chaque fois qu'elle était abîmée et meurtrie.
Je poursuis ma découverte de l'oeuvre littéraire de Martin Page, après l'excellent Manuel d'écriture et de survie et le sympathique Comment je suis devenu stupide. Il s'agit cette fois d'un roman publié en 2016 et dont le titre L'art de revenir à la vie est une jolie promesse. Le résumé lui aussi était prometteur :
Martin vient d'avoir 41 ans. Il se rend à Paris pour rencontrer une productrice qui souhaite adapter un de ses romans au cinéma. Logé chez un ami artiste, il découvre la dernière œuvre de celui-ci, une curieuse « Machine à remonter le temps ». Il s'y glisse et s'y endort. le temps d'une nuit, le voilà revenu 29 ans plus tôt, face à un double de lui-même âgé de 12 ans.
Le lendemain, il retrouve la productrice pour discuter de l'adaptation de son roman. Mais très vite, tout déraille.
Chaque nuit que compte ce séjour parisien où rien ne se passe comme prévu, Martin et son jeune-moi poursuivent leur conversation. Tout en lui révélant une partie de son avenir, le quadragénaire cherche à donner des conseils à l'adolescent, il veut l'aider et lui éviter les expériences douloureuses. Mais la relation se complique : ce jeune double a l'esprit de contradiction et ses remarques poussent Martin à se remettre en question. Vie rêvée et vie réelle deviennent aussi déstabilisantes et excitantes l'une que l'autre.
À la fois décalé, drôle et profond, le nouveau roman de Martine Page est aussi une réplique au pessimisme et une défense de l'imagination comme arme existentielle.
Quand on arrive à l'âge de 40 ans, une question se pose, en tout cas c'est une question que mes amis et moi nous nous posons après quelques verres de vin : comment a-t-on fait pour s'en sortir ? On a échappé au suicide, aux accidents et à la maladie. On se sent comme un rescapé. Et, dans le même temps, on comprend qu'il faut vivre, travailler et aimer comme jamais. On est un survivant en sursis, et il n'y aura jamais rien de mieux que cet état de fragilité, parce que le contraire de la fragilité ce n'est pas la force, c'est la mort. C'est tout à la fois déprimant et exaltant.
Mon jeune-moi m'inspire. Il ne fait pas de concessions. Il ne flanche pas. Ce qui est magnifique dans la jeunesse et ce qui crée une nostalgie pour cette période, ce n'est pas l'innocence ou l'insouciance, toutes ces bêtises, ce ne sont pas non plus la peau souple et les énormes goûters au chocolat. C'est l'éthique. Certains adultes se plaignent des jeunes adolescents pour une seule raison : parce que ceux-ci ont souvent raison. Ils leur rappellent leurs compromissions actuelles, ce qu'ils nomment dans la novlangue caractéristique de l'âge adulte le « réalisme ». Les adultes renvoient les comportements adolescents à un définitif : « C'est les hormones », ça leur permet d'oublier qu'eux-mêmes se sont assagis et désensibilisés sous la pression non pas de la biologie, mais de la vie en société.
Je ne pense pas que je sois un héros comme le voulait mon double. J'en suis loin. Mais cette ambition est comme une luciole qui m'accompagne. Je n'aimerais pas être à la place de quelqu'un qui pense que les livres ne changent pas la vie. J'écris pour essayer de sauver les autres. Non, je rectifie : j'écris pour me sauver moi-même. Peut-être que ce n'est pas contradictoire. Une chose est sûre : c'est le signe d'une ambition démesurée, sans doute d'une certaine folie. Tant mieux. On est vivant pour ne surtout pas être raisonnable. J'ai toujours pensé qu'on sauvait par des gestes furtifs et des actes improuvables. Il s'agit de rendre les fantômes fiers de nous.
[...] J'ai 12 ans, et toute ma vie sera un combat pour défendre cet âge.
Martin Page est décidément un auteur à multiples facettes. Plus je découvre ses oeuvres, plus je découvre sa capacité à écrire dans des genres différents. Après l'oeuvre épistolaire sur le thème de l'écriture avec son [b:Manuel d'écriture et de survie 22068459 Manuel d'écriture et de survie Martin Page https://images.gr-assets.com/books/1399834608s/22068459.jpg 41401346], après le roman humoristique avec [b:Comment je suis devenu stupide 442916 Comment je suis devenu stupide Martin Page https://images.gr-assets.com/books/1403186654s/442916.jpg 180608], après la pseudo-leçon de vie de [b:L'art de revenir à la vie 29894334 L'art de revenir à la vie Martin Page https://images.gr-assets.com/books/1460456036s/29894334.jpg 50269523], et après le roman de zombies avec [b:La nuit a dévoré le monde 15751481 La nuit a dévoré le monde Martin Page https://images.gr-assets.com/books/1342281555s/15751481.jpg 21445820], je découvre sa tentative s'attaquer au thème des super-héros avec Je suis un dragon.Je me souviens que la lecture du résumé m'avait donné envie, car l'approche par un romancier français d'un genre dominé par les comics américains m'intéressait :« On s'habitue à être surhumain, et très vite on comprend que ce n'est qu'une des multiples façons que la vie a trouvées pour nous dire qu'on est un inadapté. »Margot est une jeune orpheline timide et solitaire. Un jour, elle découvre sa véritable nature : elle est douée de capacités extraordinaires. Ces pouvoirs la terrifient, elle les dissimule jusqu'à ce qu'un événement tragique la contraigne à se dévoiler. On lui demande alors de mettre ses dons au service de l'humanité. Sa vie se partage désormais entre son quotidien de jeune fille espiègle et des missions d'une grande violence. Adulée et crainte, elle devient une icône. Mais peut-on sauver le monde si l'on s'y sent étranger ?En s'inspirant de l'univers des superhéros, Martin Page se réapproprie les codes habituels du genre. Captivant, bouleversant, Je suis un dragon est un roman sur la puissance de la fragilité et sur la possibilité de réinventer sans cesse nos vies.Le début du roman m'a beaucoup plu, avec un récit qui commence très classiquement mais efficacement par l'enfance de Margot, la découverte de ses super-pouvoirs, et son initiation comme super-héroïne sous le costume et l'identité de Dragongirl. Il n'y a rien de vraiment novateur jusque là, mais ça fonctionne bien et ça change de lire cela sous la forme d'un roman, avec tout le style et la richesse qu'un écrivain peut apporter, par rapport à une bande-dessinée comme j'en ai lu des dizaines. On retrouve les autorités qui veulent utiliser les pouvoirs et l'image de Dragongirl pour leurs propres intérêts, qu'ils soient militaires ou politiques.La seconde partie du roman, quand Margot se rebelle et décide de prendre son indépendance en abandonnant le costume de Dragongirl m'a un peu moins plu. Le récit devient alors plus fouillis, moins palpitant. Peut-être parce qu'on sort un peu des sentiers battus mais qu'il manque une ligne directrice pour comprendre où l'auteur veut nous amener. Cela reste bien écrit et globalement intéressant , mais j'y ai trouvé moins d'intérêt que dans la première partie.Dans l'ensemble, Je suis un dragon est un bon roman, plaisant à lire. C'est une ré-appropriation réussie du genre du super-héros par un écrivain talentueux qui montre qu'il a plusieurs cordes à son arc. C'est décidément un auteur que je vais continuer à suivre à l'avenir.
Je poursuis ma découverte des oeuvres de Martin Page, après Manuel d'écriture et de survie, Comment je suis devenu stupide et L'art de revenir à la vie. Cette fois, il s'agit d'un roman publié à l'origine sous pseudonyme. Pit Agarmen est en fait un avatar de Martin Page, qu'il utilise comme nom de plume quand il s'essaye à la littérature de genre.
Le genre en question, c'est le roman de zombies, comme le laisse tout de suite comprendre le résumé, même si le livre ne se limite pas à cela :
Quand les hommes se transforment en zombies, et qu'un jeune écrivain se trouve seul confronté à cette violente apocalypse, il n'est finalement pas si surpris. Depuis longtemps l'homme a fait preuve de sa décadence et de sa cruauté. Aujourd'hui, un pas de plus dans l'abomination a été franchi : il est devenu un monstre anthropophage.
Face à cette nuit de cauchemar, tel Robinson sur son île, le jeune survivant s'organise. Il vit reclus dans un appartement et se croit un temps à l'abri, en dépit des attaques répétées des morts-vivants. Mais la folie de ce nouveau monde fait vaciller sa propre raison. Pour échapper au désespoir, il réapprend à vivre et à lutter, Armé d'un fusil, il découvre avec surprise qu'il peut tuer et qu'il a même un certain talent pour ça. En réinterrogeant son passé, il se livre aussi à une introspection sensible sur sa propre condition et les raisons de ses échecs passés. C'est son inadaptation à la société des hommes qui explique peut-être sa survie à cette fin du monde.
Un roman d'action, littéraire et psychologique, qui reprend les codes du genre pour mieux les subvertir.
Il m'a fallu un mois pour comprendre que les zombies ne sont pas le vrai danger. Je suis mon pire ennemi. Les zombies ne peuvent franchir les trois étages, ils ne peuvent défoncer la porte. Par contre, ils courent dans ma conscience comme s'ils en avaient toutes les clés. Ils sont à l'intérieur de moi et il n'y a rien de plus effrayant. À quoi bon vivre dans un tel monde ? À quoi bon vivre si on est seul ? Ceux que j'aimais sont morts. À certains moments, je pense me laisser contaminer : devenir l'un d'eux, céder au conformisme. Il suffirait d'une morsure. Ils m'attirent comme le vide attire celui qui souffre du vertige. Je me sens aimanté, j'ai envie de me jeter dans leurs griffes et qu'ils me mettent en charpie, qu'ils me réduisent à l'état de masse informe et sanglante. Et me fassent disparaître. Ce ne sont pas seulement des démons. Ce sont mes démons, et ils m'obsèdent. Je suis terrifié par la place qu'ils prennent dans ma tête.
D'ou viennent-ils ? Sont-ils le fruit d'expériences de l'armée américaine ? Une mutation naturelle de l'espèce ? Un virus ? Je ne suis pas biologiste, je ne compte pas faire de prélèvements. Ne pas savoir est une chance : la vérité est soit trop laide, soit trop banale. Il vaut mieux imaginer les mille explications possibles. C'est comme le big bang : on ne sait pas, et c'est tant mieux. Une chose est certaine : on parle de zombies depuis la nuit des temps. C'est un invariant dans l'esprit des hommes. Ils étaient là dans les légendes pour nous signifier notre mortalité, la mort dans notre vie, et la vie dans la mort. Nous avons été arrogants avec notre médecine et nos vitamines, avec notre ambition de faire disparaître la présence de la mort en mettant les cimetières à la marge de nos villes, en médicalisant les décès, en oubliant les rituels païens du deuil. La mort règne, on n'y changera rien. Je le sais depuis ma première crise d'angoisse existentielle à l'âge de six ans dans la petite chambre de l'immeuble d'une cité grise et pauvre où vivaient mes parents. Les zombies arrivent au moment juste. C'était leur tour d'entrer sur scène. Ils viennent terminer la destruction de l'humanité que nous avions commencée avec les guerres, la déforestation, la pollution, les génocides, l'élevage intensif et le pillage sanglant des océans. Ils réalisent notre plus profond désir. Notre propre destruction est le cadeau que nous demandons au Père Noël depuis la naissance de la civilisation. Nous avons enfin été exaucés.
J'ai toujours su que les gens étaient des monstres. Alors qu'ils soient aujourd'hui des zombies, ça n'est qu'une confirmation. La métaphore s'est incarnée.
Dans mes moments les plus sombres avant l'épidémie, je me laissais aller à souhaiter que tel ou tel se casse une jambe. Mais je n'aurais pas osé faire le vœu de la disparition de l'humanité. Je n'y avais pas pensé, et pourtant, c'était ça la solution, c'était ça le remède qu'il me fallait. Je n'ai plus d'ulcère à cause de la faim dans le monde, de l'avidité économique assassine, des malades dans les hôpitaux. La souffrance repose en paix. C'est la fin des idiots combats pour l'argent et le pouvoir. L'humanité se tient au chaud dans les rêves de ceux qui ont survécu. Elle est intacte, belle, forte, c'est une flamme que je porte en moi. L'erreur avait été d'en faire une réalité.
Les zombies se sont emparés du monde sans aucune stratégie autre que la satisfaction de leurs instincts. Quelle leçon donnée aux hommes, en particulier aux politiques et aux militaires, spécialistes des coups, des ruses et de l'organisation. C'est la rage meurtrière qui a vaincu, le désir de se nourrir et d'occuper l'espace. Des notions primaires et efficaces. Peut-être que si nous avions gardé ce lien avec nos propres élans vitaux, peut-être que si nos désirs n'avaient pas été captés par des choses dérisoires, si nos passions ne s'étaient pas nichées dans des objets de consommation, des voitures, des appareils électroniques et des vêtements, alors nous aurions eu assez de cran et de ruse pour résister, et nous sauver. Les arrogantes certitudes de notre espèce ont permis à un ennemi inattendu de nous renvoyer à la préhistoire. Il n'y a pas eu de lente catastrophe, de délitement, de pourrissement. Notre monde est tombé sous la coupe des zombies en un clignement de paupière. La nature a mis du temps avant de nous concocter un adversaire à notre mesure. Les tigres à dents de sabre, la peste, la grippe, le sida n'avaient pas réussi à nous anéantir. Finalement, la nature nous a éliminés à l'aide de versions monstrueuses de nous- mêmes. J'ai toujours su que les hommes disparaîtraient sous un ciel ironique. Et puis, il faut le dire : les morts-vivants sont plus civilisés que nous. L'air est moins pollué, les animaux respectés.
Pendant quelques siècles, tant que les zombies seront là, l'humanité aura une place qui lui permettra de se survivre. Car en définitive je sais que les zombies nous protègent de nous-mêmes : nous ne nous massacrerons plus entre nous tant que nous avons un ennemi commun. Plus besoin de communistes, de Juifs, d'Arabes, d'ennemis préfabriqués. Après ? On verra. Peut-être qu'il faudra leur inventer des successeurs.
Les êtres humains m'apparaissent comme des monstres. Les zombies, les loups-garous, les vampires ne sont pas des mythes. Ce sont des êtres réels que nous croisons tous les jours. Nous sommes monstrueux. C'est un fait. Cela implique que nous sommes capables de grandes violences, mais que nous sommes aussi doués de pouvoirs magiques et de forces incroyables pour, si nous le désirons, faire le bien. L'histoire des humains, c'est l'histoire de la destruction d'humains par des humains, mais aussi de comment certains parfois rusent, et parfois répliquent.
J'avais commencé ce roman de Fred Uhlman il y a plus de deux semaines mais mon déménagement m'a beaucoup occupé et j'ai très peu lu pendant ce laps de temps. Je viens de profiter d'une journée de repos pour terminer ce court roman de moins de cent-vingt pages.
Le résumé m'avait tout de suite séduit et en temps normal j'aurais certainement dévoré ce roman en moins de deux jours :
On a grey afternoon in 1932, a Stuttgart classroom is stirred by the arrival of a newcomer. Middle-class Hans is intrigued by the aristocratic new boy, Konradin, and before long they become best friends. It's a friendship of the greatest kind, of shared interests and long conversations, of hikes in the German hills and growing up together. But the boys live in a changing Germany. Powerful, delicate and daring, Reunion is a story of the fragility, and strength, of the bonds between friends.
I can't remember exactly when I decided that Konradin had to be my friend, but that one day he would be my friend I didn't doubt. Until his arrival I had been without a friend. There wasn't one boy in my class who I believed could live up to my romantic ideal of friendship, not one whom I really admired, for whom I would have been willing to die and who could have understood my demand for complete trust, loyalty and self- sacrifice.
From outside our magic circle came rumours of political unrest, but the storm-centre was far away – in Berlin, whence clashes were reported between Nazis and Communists. Stuttgart seemed to be as quiet and reasonable as ever. It is true that there were occasional minor incidents – swastikas appeared on walls, a Jewish citizen was molested, a few Communists were beaten up – but life in general went on as usual.
There seemed to be nothing to worry about. Politics were the business of grown-up people; we had our own problems to solve. And of these we thought the most urgent was to learn how to make the best use of life, quite apart from discovering what purpose, if any, life had and what the human condition would be in this frightening and immeasurable cosmos. These were questions of real and eternal significance, far more important to us than the existence of such ephemeral and ridiculous figures as Hitler and Mussolini.
La femme qui ressuscite est le premier roman de Nadia Oswald, que j'ai eu l'occasion de découvrir et de lire en service de presse par l'intermédiaire de la plateforme NetGalley.fr. J'avais sollicité ce livre car son résumé m'avait interpellé :
Février 1919. Une jeune fille se réveille dans le lit d'une clinique de Berlin, amnésique, après s'être jetée dans le fleuve. Le mystère autour de son identité commence, en même temps qu'une des plus grandes énigmes du XXe siècle.
Est-ce Anastasia Romanov, la dernière survivante du clan Romanov épargnée par les bolcheviks... ou l'ambitieuse petite paysanne schwab de Pologne qui réussira toute sa vie à donner le change auprès des familles impériales de la planète en se faisant passer pour la défunte princesse ?
L'héroÏne reconstruit sa mémoire et son identité... mais sont-ce bien les siennes ?
Sans jamais prendre parti ni donner les clés, Nadia Oswald donne vie à cette réincarnation mentale et physique. Premier roman servi par une langue prodigieuse, baroque et poétique, La Femme qui ressuscite fait revivre un mystère, un double portraits de femme, et un esprit que le trouble de l'inconnu mènera jusqu'aux limites de la folie.
Outre la saga des Romanov, le livre nous plonge aussi dans la fn de l'empire des Tsars, le Berlin de l'après-première guerre mondiale, la diaspora Russe nostalgique de l'époque impériale, l'Amérique des années folles et l'exubérance artistique des années 20 ...